• Michael Jackson et les panégyristes

    Je me souviens, à l'époque, je travaillais pour une radio libre parisienne.

    Je me souviens, en ce temps-là, il était de bon ton chez les mélomanes avertis, ceux-là mêmes qui s'extasient aujourd'hui, et chez les autres aussi, d'ailleurs, de mépriser Michael Jackson, cette daube commerciale, dixit, pour s'adonner inconditionnellement à Prince. Kiss.

    Je travaillais donc pour une radio parisienne et nos spécialistes rock maison, qui s'étaient battus avec acharnement pour savoir qui couvrirait le concert du grand Prince, avaient du tirer au sort pour décider lequel d'entre eux se dévouerait pour celui de Michael Jackson.

    Le sort tomba sur le plus jeune, qui, la mort dans l'âme, traîna les pieds jusqu'au Parc des Princes. Berk.

    C'était il y a 19 ans, presque jour pour jour. Je revis le martyr le lendemain.

    - Alors ?

    Sourire extatique. Vous me croirez ou non, mais mon pote le rocker était transfiguré.

    - Alors, ce mec, c'est Peter Pan.

    - Quoi ?

    - Peter Pan, je te dis. Il vole. Ses pieds ne touchent pas le sol. Il est tout petit et tu ne vois que lui. Il envahit la scène. C'est de la magie.

    - Tu as pris quelque chose ?

    - Avec ce mec-là, même pas besoin. Un lutin, je te dis. Un lutin.

    Le jour où mes enfants m'ont demandé si je connaissais Michael Jackson, parce que de sombres histoires circulaient sur son compte, je leur ai dit que tout ce que je savais vraiment sur ce personnage, c'était ce que je viens de raconter ici. L'histoire d'un type qui savait voler. Cela seul est vrai.

    Le reste, je me refuse à commenter parce que je ne comprends pas cette incompréhensible folie qui l'entourait. Celle inconsciente des parents qui envoyaient leurs gosses dormir chez lui. Celle criminelle des médecins qui avaient oublié leurs hypocrites serments. Celle injuste de tous ceux qui firent semblant d'oublier combien difficile il est d'être noir en hiver.

    Comme celle, indécente, de tous les panégyristes du jour qui se délectent sans vergogne de ce miel qui aujourd'hui pas plus qu'hier n'assura les plumes d'Icare.


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